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Des roses pour le procureur : Merci pour le chocolat


Suite à son visionnage sur le site d’ARTE, retour sur le titre de Wolfgang Staudte.


Treize années après Les assassins sont parmi nous (1946), (re)lisez-moi ou pas, Staudte dirige donc le second pan de son diptyque apocryphe, en réinvente l’esthétique, en redéfinit la dynamique, en réaménage la thématique. Des roses pour le procureur (1959) comporte encore un couple trouble, lié par le passé qui ne saurait passer, pas même au milieu d’une Allemagne déjà reconstruite, presque amnésique, toujours antisémite. Écrit par Georg Hurdalek, (Le Général du Diable, Helmut Käutner, 1955, sur lequel j’écrivis aussi), basé sur une idée du réalisateur, plus ou moins inspiré par un fait divers, ce métrage d’un autre âge se déleste cependant de l’expressionnisme, des pulsions homicides, du nazisme converti au capitalisme. Si Les assassins sont parmi nous donnait dans le mélodrame didactique, Des roses pour le procureur s’avère une satire sentimentale. Histoire de marché noir, d’exécution/explosion/évasion, de camelot, de marmot, de bouquet codé, de mémoire amère, de notables assis à une table, de repas diplomatique « improvisé », reporté, de vitrine (pas juive, quoique) vandalisée, de document dérobé, de procès de boucle bouclée, à orateur en sueur, espionné par ses supérieurs, l’opus appréciable s’achève sur un rétroviseur, sur un surcadré bonheur, manière de (dé)montrer que regarder en arrière revient à regarder vers l’avant, à se débarrasser de l’absurdité, de l’insanité, à causer un scandale salvateur, à redevenir, en civil, un acteur. « Mauviette » qui baisse la tête, au propre, au figuré, caporal à « fringale », condamné (à mort, à l’exil) en sursis, Rudi renaît à la vie, à l’envie, grâce à la présence, à la persévérance, de l’installée Lissy. La blonde platine se déshabille, dotée d’un corset, d’une culotte, d’escarpins noirs, sa nudité silhouettée surprise ou devinée, à moitié révélée, par un haut rayé, immaculé. Pourvue d’un réveil « kaputt », l’hôtelière solidaire, romance d’errance, glisse ses cuisses au bord du lit du marchand démuni, chambre rénovée d’ancien béguin.





Tout ceci pourrait sembler rassis, racoleur, sucré, téléphoné, toutefois séduit par son érotisme incitatif, pas onaniste, par son féminisme soft, par sa façon de concrétiser la caractérisation, de susciter l’émotion, d’arrimer la rédemption disons au creux de la matrice magnanime. Les deux militaires traumatisés du tandem de Staudte doivent se secouer, doivent leur salut à deux bienveillantes bienvenues. Ce réconfort féminin, mon visage posé sur tes seins, le pleutre procureur le connaîtra idem, via sa dévouée Hildegard, maman d’un enfant mal coiffé, rapporté, parricide, amateur de boxeur, auditeur à domicile de « musique de nègres », spectateur moqueur d’audience déguisée en psychodrame. Ingrid van Bergen & Camilla Spira incarnent avec charme, talent, ces deux personnages similaires, différents. Face à elles, Walter Giller & Martin Held ne déméritent pas, loin de là, pas davantage le reste du castingchoral, composé d’acteurs locaux (re)connus. Difficile à financer, même transformé, sinon adouci, en comédie, Des roses pour le procureur, plutôt précurseur, portraiture ainsi une justice « qui se lave trop les mains », un « antinazi » trop  joli, un sale secret en public partagé, une patrie procédurière, policière, où un flic flanche sur un toponyme hitlérien, où quatre acolytes effectuent un caméo menaçant, comique, une « majorité silencieuse » prometteuse, oiseuse, tendancieuse, tardivement audacieuse. Scandé par la célèbre Entrée des gladiateurs sans cesse réarrangée, remarquez en outre le mambo rigolo de Raimund Rosenberger, le cirque jamais sinistre, aimable, modeste, de Des roses pour le procureurmérite sa découverte estivale, divertissement intelligent dû à un cinéaste attentif, précis, lucide, ludique, bien aidé par le beau boulot du directeur de la photo Erich Claunigk, dont le clair-obscur éclairant, éloquent, illumine/matérialise l’affrontement de l’argument, mention spéciale à la lumière de la verrière centrale, cernée, entourée, par un expressif couloir ombré. 



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