Quantcast
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2012

Être libre : Ne pas oublier Michel Colombier

 

Touche-à-tout et bon à rien ? Lyonnais, Américain…

Colombier composa beaucoup, des deux côtés de l’Atlantique, son corpusainsi se place sous le signe d’un éclectisme assumé, sinon en sourdine revendiqué, par un homme discret, plusieurs fois père puis victime prématurée du cancer. Avant d’être enterré à L.A., l’estimable Michel, inspiré par son papounet, formé de façon classique, croisa donc le chemin du mentor Magne, devint vite directeur musical, chez Barclay, s’il vous plaît, célébra la messe selon le messie Henry, collabora avec Aznavour & Gainsbourg, Barbara, Petula (Clark, whofucking else?), Madonna, Polnareff & Nougaro, les Beach Boys, Supertramp ou Air, mena forcément à la baguette de renommés orchestres, dont le London Symphony Orchestra, voilà, voilà. Tout cela ne lui suffit pas, puisqu’il signa en sus des BO (en français), des OST (en anglais), à destination du ciné, de la TV, une trilogie jolie, au creux de laquelle (ré)écouter le fameux Emmanuel, issu de l’album bien nommé Wings(1971), mélancolique madeleine proustienne, à jamais liée à une enfance en France, sur le seuil des seventies, animation en suspension du sieur Folon en option. Il ne s’agit pas ici de parcourir à fond sa filmographie, plutôt de donner l’envie d’à nouveau s’y aventurer, à l’occasion de quelques pièces expertes, comme de bonnes bornes, sur un itinéraire encore d’aujourd’hui, même tracé hier. En guise de petit et désinvolte prélude, voilà Ventura Lino en bateau, escale de Sautet (L’Arme à gauche, 1965). Tant pis pour les pizzicati en série pré-Penderecki (L’Exorciste, Friedkin, 1973) d’une menace informatique (Le Cerveau d’acier, Sargent, 1970), on (re)commence vraiment en compagnie de Melville, de son Flic (1972) dépressif, adoubé par la belle Isabelle (Aubret boit Bergman), porté par un beau piano pas si solo.

Vite on verse vers la valse valeureuse et vénéneuse des Onze Mille Verges (Lipmann, 1974), dispensable polissonnerie pasteurisée, malgré une Marion Game leste et topless. Appréciez aussi la douceur en duo, presque en concerto, orchestre + piano, de Florence et Nathalie, au saphisme soft et poli. Un Drupi venu d’Italie (dé)chante Le Hasard et la Violence (Labro, 1974) et des hommes l’amoureuse maladie. Autre ambiance, autre résonance, de Roubaix abonde dans ce sens, pour le thème majeur de L’Alpagueur(1976), de Labro & Belmondo, voire l’inverse, bien urbain et point serein. Sur le point de partir s’installer aux States, Delerue dut lui souhaiter la bienvenue, le compositeur prend Une chambre en ville (1982) au pays de Jacques Demy, au passage y magnifie avec classe la lutte des classes. Chez les ZAZ, Michel ne fait du zèle, toutefois se fend de synthés utilisés à bon escient, esprit du temps (Ya-t-il quelqu’un pour tuer ma femme ?, Jim Abrahams, David & Jerry Zucker, 1986). Quant au Cop (Harris, 1988) d’après Ellroy, curiosité à demi réussie, à moitié ratée, il s’assortit d’un sax irrésistible, à l’instar de la trompette superbe de Chinatown (Polanski, 1974), dû au maestro Goldsmith. New Jack City (Mario Van Peebles, 1991) possède ce morceau groovy, à la basse grasse de grosse métropole, au développement dangereux et insidieux, dérive du rythmique en direction du climatique. Si Dernière Limite (Duke, 1992) soudain sample le Jimmy Page délesté de zeppelin de Un justicier dans la ville 2(Winner, 1982), Trippin’  (Raynr, 1999) dispose d’un tempo de calypso, séduit les sens aussitôt, tandis que l’itou méconnu Midnight Cabaret (Dingo, 1990) se base sur du jazzà jouer « autour de minuit », yes indeed.

Escorté du Serge précité, le cher Michel démontra sa maestria orchestrale sur Sij’étais un espion (Blier, 1967), Cesacré grand-père (Poitrenaud, 1968) et surtout Manon 70 (Aurel, idem), muni d’un titre homonyme quasi sublime, interprété par l’intéressé. Terminons ce succinct tour d’horizon grâce à la grâce de l’une de ses dernières partitions, transposition sur l’écran diminué de Largo Winch, célèbre BD. Je le précisais plus haut, la discographie de Colombier demeure à revisiter, par exemple ce qu’il cogita pour Le Convoi de lapeur (Friedkin, 1977), Contre toute attente (Hackford, 1984) ou DoubleJeu (Locke, 1990). À d’autres l’exhaustivité, à vous de vous faire votre idée, d’aller (re)découvrir des scores tout sauf à proximité du pire, y compris accordé au dérisoire À la dérive (Ritchie, 2002), remake merdique de Vers un destin insolite sur les flots bleus de l’été (Wertmüller, 1974), à l’opus un peu pompé, assurément miroité, sur le Spiegel im Spiegel du jovial Arvo Pärt, pas grave. Se fichant des chapelles, se foutant des étiquettes, traversant toutes les fausses frontières du son et de la Terre, Michel Colombier mieux que quiconque sut reconnaître, via sa diversité, de la musique l’essentielle unité – de la même manière, les genres n’existent pas au cinéma, seulement les imageries d’un art à la fois multiforme et uni. « J’ai toujours essayé de créer des passerelles, d’organiser des fusions entre toutes les musiques qui m’ont touché et nourri » (se) résumait-il auprès du spécialiste Stéphane Lerouge. Pari réussi, son style à lui, singulier, mélangé, continue à surprendre, digne de s’entendre, se caractérise par sa sincérité, son inventivité, sa générosité. Personne ne s’arrange avec/de sa mort, mon trésor, mais l’arrangeur doté d’un cœur arrangea souvent nos vies, les rendit souples et sexy, afortioriDu fond de mon lit,moins de trois minutes oniriques, érotiques, que survole sa voix. Du reste et de ceci, on le remercie, oh oui, baby.


Viewing all articles
Browse latest Browse all 2012

Trending Articles