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Channel: Le Miroir des fantômes
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Le Coup du parapluie

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Un métrage, une image : La police a les mains liées (1975)

Cinq ans plus tôt, Britt Ekland déjà descendait prendre le dernier métro, Eurydice destinée au sacrifice, belle « rebelle » d’une dystopie dont la surface affichait d’intouchables cadavres intacts (Icannibali, Caviani, 1970). Cinq ans plus tard, Milan ressemble encore au royaume des morts, donc des vivants en sursis, qui le savent ou l’ignorent, tel cet assassin descendu/hissé sur un escalator, anticipant ainsi celui de L’Impasse (De Palma, 1993), ses pieds inanimés toujours agités, viale mouvement indifférent, face au commissaire vénère, debout, de lui venu à bout. Si la justice se doit d’être aveugle, voire aveuglée, yeux bandés, balance dressée, le ciné devrait dessiller, donner à regarder doté de douloureuse clarté, quitte à scruter l’obscurité. Opusd’objets, presque à la Perec, par exemple un réveil, une valise, un briquet, une clé, un chamberlain malsain, une ardoise magique, de subterfuge phonique, La polizia ha le mani legate comporte un policier + un suspect tous deux lunettés, en plus une séquence chez l’ophtalmo de mise en abyme méta, d’alteregoillico, au client miroitant Montand (L’Aveu, Costa-Gavras, 1970). Avec le valeureux Le foto proibite di una signora per bene (1970), Ercoli démasquait une machination masculine ; ici, il carbure à la culpabilité décuplée, ne nomme personne, accorde la responsabilité du complot in extremis, à de fantomatiques fascistes, des « fonctionnaires prévaricateurs nostalgiques du passé » un brin mussolinien, parce qu’il le valait bien. Dagmar Lassander frisait la folie ;  Sara Sperati (SalonKitty, Brass, 1975) se fait flinguer, dans le dos, dans la rue, « jeune fille de bonne famille » effarée, effondrée, à cigarette suspecte, au courant de la planque du camé, nageuse dangereuse en eaux troubles et rouges. Auparavant, elle se faisait baiser sans tarder, par son condé préféré, siège avant de Mercedes d’occase et immaculée baissé, comme sa culotte, au bord de la flotte, effrayée à l’idée de finir asphyxiée au cause du gaz substitué à l’essence, pas de chance. La maîtresse se révèle complexe, mais Ercoli ne verse vers la misogynie, pour sa fable affable de flic lecteur de MobyDick, pêcheur à la ligne, à sœur oculiste, qu’incarne un Claudio Cassinelli (moult Martino, du Cozzi, du Fulci) de façon physique, flanqué des incontournables Franco Fabrizi & Arthur Kennedy. Dû à la plume précise de Gianfranco Calligarich, co-scénariste de LaCitédelaviolence(Sollima, 1970), le poliziottesco au cordeau se souvient en sus, images d’archives à l’appui, de l’attentat traumade piazza Fontana, survenu en décembre 1969, relooké en conférence cosmopolite d’hôtel du parc princier, à « l’art naïf » (le cinéma, pourquoi pas) consacrée, accessoirement rassemblent de « minorités opprimées », olé, au décor et aux corps explosés, exposés, érotisme macabre en écho aux bas d’Anna (Magnani), assassinée selon Rossellini (Rome, ville ouverte, 1945). Sorte de réponse au précédent Confession d’un commissaire de policeau procureur de la république (Damiani, 1971), ponctué d’un  thème entêtant du maestro Stelvio (Cipriani), le métrage de son âge invite à se réveiller, au propre, au figuré, au milieu d’une réalité cauchemardée, afin de s’y confronter, de la combattre, infined’y succomber, puisque le procureur démissionne, puisque le protagoniste se transforme en ange exterminateur, rempli de ressentiment, de rancœur, cf. l’explicite et lapidaire carton de conclusion. Chez Melville, Achab crevait de son obsession du trop gros poisson ; chez Ercoli, tout apparait pourri, sali, cruelle cartographie de l’Italie.


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