Un métrage, une image : Le Cœur à l’envers (1980)
À Jacqueline de Castille
Co-écrit, ou plutôt commis, par des complices de Claude Chabrol & Roman Polanski, à savoir la scénariste Odile Barski et le dialoguiste Gérard Brach, Le Cœur à l’envers s’inscrit ainsi dans le sillage d’un autre âge, celui de l’inceste au ciné, en version seventies SVP. Il ne saurait cependant, pas un seul instant, rivaliser avec les déjà très surestimés Le Souffle aucœur (Malle, 1971) et La luna (Bertolucci, 1979), diptyque historique et pudique, a fortiorilorsque comparé aux spécialisés opuspornographiques, imagerie américaine numérisée de notre modernité masturbée, même déminée, pasteurisée, selon ses épuisantes et épuisées stepmommies en série, l’explicite étasunien toujours en définitive puritain, hein ? Construite en boucle bouclée désenchantée, l’histoire de restauration, familiale, picturale, aux deux tiers se déroule à Paris puis durant le dernier se trame en Espagne, charme touristique de co-production cacochyme, sise sous l’égide du littéraire et lucratif Bernard Lenteric, où apercevoir de manière presque subliminale, déguisée en guide locale, secourable, la gracile Victoria Abril. Encore au rayon caméo, Le Cœur à l’envers donne l’occasion de croiser Stéphane Audran en dépassée et giflée maman, Charles Denner en romantique soumis et désarmant artisan, un soupçon lacéré, donc courroucé, « Société de merde ! », en effet, draps immaculés déchirés, à racheter, Florence Pernel en juvénile Pauline, directe et indocile, je verse et renverse du rouge, je veux que tu me fasses l’amour, même si je n’aime pas les garçons, allons bon. Elle s’adresse au fils peu prodigue, très tourmenté, incarné par le transparent Laurent Malet, amateur de bague dogon à la con, de Mozart au rencard et de rythmique mimétique, mécanique, à rameuter de nuit le raciste vilain voisin. Chez les Rivière, le fiston et sa mère, il faut s’en faire, d’abord se refaire, in fine se défaire. Annie Girardot, en ersatz ou émule de Françoise Dolto, affronte de front un complexe d’Œdipe carabiné, joue le jeu dangereux de son Julien point serein, jaloux voleur de bijoux, jusqu’au moment de dessillement, merci au tandem d’indigènes, qui ramène la romance de seconde chance à un pragmatisme cynique. La chère chair de sa chair de retour en étrange étranger, lequel accueillir, accompagner, auquel quasi succomber, jadis son maudit mari la lui ravit, je vais t’apprendre à reprendre des études de psychologie, elle ne l’abandonna, oui-da, ma vérité voilà. La coda téléphonique et téléphonée paraît un lapsus assumé, un acte manqué réussi, permutation de pétrarquiste prénom, Laure, mon trésor, pour un « Maman » évidemment bienséant, rassurant, ordre des choses moroses, des sentiments à contretemps, renversé, vive la normalité, la maternité à réinstaurer. Formé à l’ORTF, ex-voyagiste en Afrique, Franck Appréderis se réorienta fissa vers la TV, nul cinéphile ne saurait s’en étonner, ni d’être tombé dans un oubli mérité, dommage à l’égard d’Annie, digne d’être pardonnée…